De nombreuses applications IFPEN, allant de l’extraction liquide-liquide pour la production de biocarburant au procédé de flottation pour la séparation des microplastiques, mettent en jeu des interactions entre un fluide et le grand nombre d’inclusions (bulles, gouttes) qu’il contient.
La difficulté à décrire ces interactions est liée aux écoulements en tant que tels mais aussi aux phénomènes physiques intervenant à différentes échelles : des forces colloïdales agissant à l’échelle moléculaire jusqu’aux forces hydrodynamiques agissant à l’échelle de l’écoulement.
Or, ces phénomènes ne sont pas indépendants. En effet, la physique des interactions à l’échelle locale de l’interface entre les deux phases (fluide et inclusions) régit le comportement macroscopique de l’écoulement, via les phénomènes de rupture/coalescence, et donc aussi la taille des inclusions. Cette taille influe en retour sur les efforts hydrodynamiques que les inclusions subissent.
Il n'existe pas de théorie qui fasse consensus pour décrire l’ensemble de ces phénomènes. Aussi, chaque nouveau cas d’étude rend nécessaire la réalisation de simulations numériques ou l’acquisition de données expérimentales. Des simulations moléculaires et des expériences fines permettent ainsi de remonter aux propriétés interfaciales d'intérêt, indispensables pour une description précise des phénomènes de rupture/coalescence.
Des travaux récents de ce type ont permis de remonter aux propriétés d’interfaces liquide-liquide et liquide-gaz le long lesquelles des polymères amphiphilesa avaient été distribués [1]. En parallèle, des simulations purement hydrodynamiques ont donné accès au temps de drainage dans des configurations liquide-liquide à force imposée [2]. L’utilisation combinée de ces deux approches est très prometteuse pour ce qui est d’obtenir l’épaisseur critique pour laquelle le film se rompt, en vue de l’injecter dans les lois d’échelles de temps de drainage. Par ailleurs, elle permettra une meilleure détermination de la rhéologie des fluides et des interfaces, dans l’optique d’une intégration directe dans les codes hydrodynamiques, via des lois constitutives.
Une étape supplémentaire pour alimenter les modèles d’ingénierie (de type Euler-Euler) sera de considérer un grand nombre d'inclusions coalescentes et de "moyenner" leur dynamique. Pour dimensionner des procédés industriels, il sera alors possible de ne plus considérer dans les simulations numériques chacune des inclusions avec son mouvement propre mais un fluide "moyenné", d’où un bénéfice en temps de calcul. Le passage des modèles utilisés jusqu’à présent vers ce type d’approche moyennée fait l’objet d’un projet de recherche dans le cadre d’une collaboration avec le CEA.
a- A moitié hydrophiles et à moitié hydrophobes.
Références :
- I. Henaut, C. Nieto-Draghi, A. Mouret, C. Dalmazzone, V. Lachet. Rheological behaviour of amphiphilic polymers at liquid/liquid and air/liquid interfaces: Direct comparison of experiments and coarse grain simulations. GFR 2022, 56ème Congrès du Groupe Français de Rhéologie, Rennes, 26-28 octobre 2022.
- J.-L. Pierson. Numerical study of a drop approaching a fluid-fluid interface: from sticking to bouncing. ICTAM 2021, 25th International Congress of Theoretical and Applied Mechanics, Milano (virtual), 22 to 27 August, 2021.
Contacts scientifiques : isabelle.henaut@ifpen.fr ; jean-lou.pierson@ifpen.fr ; Carlos Nieto-Draghi