FacebookTwitterLinkedInImprimer

Porté par les enjeux environnementaux et de sobriété, l’intérêt pour l’efficacité énergétique des véhicules et pour la réduction de l’impact de la mobilité va grandissant. Si la promotion de modes de transport alternatifs à la voiture reste le principal levier du changement, beaucoup peut être encore fait du côté de la régulation du trafic routier.

Une équipe IFPEN a travaillé sur ce sujet dans le cadre d’une thèse en collaboration avec le Gipsa-lab1, et a développé dans ce cadre un outil dynamique de régulation par zone des limitations de vitesse.

Une première étape de l’étude a consisté à établir, pour différentes limitations de vitesse, l’effet de la congestion du trafic sur la surconsommation de carburant, en couplant :
  

  • un simulateur de trafic en libre accès2, pour reproduire la dynamique de véhicules sous différents niveaux de congestion ;
      
  • et un modèle développé par IFPEN pour caractériser le fonctionnement d’un moteur et estimer avec une grande précision la consommation et les émissions polluantes d’un véhicule en fonction de divers facteurs : technologies du groupe motopropulseur, conditions et style de conduite, topographie du réseau, etc. [1, 2]
     

La Figure 1 reproduit en régime stationnaire la consommation moyenne des véhicules pour différentes densités de trafic et pour une limitation de vitesse de 20 km/h ou de 50 km/h. Elle est obtenue en simulant le trafic routier en régime stationnaire (cas d’un anneau routier).

Lorsque la densité du trafic est faible, une limitation de vitesse de 50 km/h est plus efficace énergétiquement en raison du régime du moteur plus favorable tant que la circulation reste fluide. A l’inverse, au-delà d’une certaine densité, une limitation de 20 km/h devient moins énergivore. Cela s’explique par le fait que l’apparition du phénomène d’« accordéon » est retardée, avec une intensité plus faible des accélérations associées lesquelles sont grandement responsables de la surconsommation.

Cliquer sur l'image pour l'agrandir
Figure 1 : Consommation de carburant moyenne en fonction de la densité du trafic
pour deux niveaux de limitation de vitesse.


À la suite de ces observations, l’idée d’un régulateur a émergé, afin de pouvoir adapter en temps réel les limitations de vitesse d’une zone urbaine [3, 4] et ainsi réduire la consommation de carburant globale du trafic.

L’impact de cette régulation a été évalué par simulation numérique sur un réseau routier d’environ 28 km, constitué d’une zone urbaine et d’une zone péri-urbaine, à une heure de pointe. Son effet a été comparé à celui de deux autres scénarios :
  

  • un scénario de référence : avec des zones de limitations de vitesse constantes ;
      
  • et un scénario dit « contrôle d’accès » : avec une régulation de la durée au vert des feux tricolores.
      
      

L‘étude met en évidence que la régulation des limitations de vitesse permet de :
  

  • diminuer la consommation de carburant (figure 2.a) ;
      
  • réduire les émissions polluantes (figure 2.b) ;
       
  • fluidifier le trafic, en augmentant la distance parcourue (figure 2.c).
     
Cliquer sur l'image pour l'agrandir
Figure 2 : Consommation de carburant, émissions de NOx, et fluidité du trafic pour chacune des trois stratégies de contrôle.

  

En pratique, le régulateur abaisse légèrement les limitations de vitesse des brins routiers menant à des zones sur le point de se congestionner. Cette anticipation permet de limiter la congestion ainsi que la surconsommation et la surémission qui s’ensuivent. On note que cela permet aussi de fluidifier le trafic.

Par ailleurs, cette méthode se révèle plus avantageuse que le contrôle des feux de signalisation, à la fois en termes d’efficacité énergétique et de fluidité du trafic, grâce à des accélérations moins fortes et des arrêts moins fréquents [5].

Pour donner la pleine mesure de son potentiel, la régulation de limitation de vitesse devra être évaluée sur des réseaux routiers urbains plus complexes et éventuellement couplée à des pratiques telles que l’eco-driving.
 

1- Grenoble Images Parole Signal Automatique.
2- Logiciel SUMO (Simulation of Urban Mobility).
   


Références :

  1. L. Thibault, P. Degeilh, O. Lepreux, L. Voise, G. Alix, G. Corde, A new GPS-based method to estimate real driving emissions, IEEE International Conference on Intelligent Transportation Systems (ITSC), 2016.
    >> https://doi.org/10.1109/ITSC.2016.7795776
      

  2. A. Pirayre, P. Michel, S. Rodriguez, A. Chasse, Driving Behavior Identification and Real-World Fuel Consumption Estimation With Crowdsensing Data, IEEE International Conference on Intelligent Transportation Systems (ITSC), 2022.
    >> https://doi.org/10.1109/TITS.2022.3169534
      

  3. B. Othman, G. De Nunzio, D. Di Domenico, C. Canudas-de-Wit, Analysis of the Impact of Variable Speed Limits on Environmental Sustainability and Traffic Performance in Urban Networks, IEEE Transactions on Intelligent Transportation Systems, 2022.
    >> https://doi.org/10.1109/TITS.2022.3192129
      

  4. B. Othman, Limitations de vitesse variables et contrôle d'accès dans un réseau routier urbain pour une meilleure durabilité environnementale, thèse de doctorat, 2021.
    >> https://www.theses.fr/2021GRALT065
       

  5. B. Othman, G. De Nunzio, D. Di Domenico, C. Canudas-de-Wit, Urban Road Traffic Fuel Consumption Optimization via Variable Speed Limits or Signalized Access Control: A Comparative Study, IEEE Conference on Decision and Control (CDC), 2021.
    >> https://doi.org/10.1109/CDC45484.2021.9683194
          

Contacts scientifiques : bassel.othman@ifpen.fr ; giovanni.de-nunzio@ifpen.fr

>> NUMÉRO 51 DE SCIENCE@IFPEN